Le nouveau règlement relatif au transport d’animaux vivants : une déception
Une maigre avancée pour les animaux à la suite de la proposition de la Commission européenne
Alors que la Commission s'était engagée, dans le cadre du Pacte Vert pour l'Europe, à proposer d'ici fin 2023 quatre textes censés renouveler la législation européenne en matière de bien-être animal, elle n'a finalement présenté qu'une seule proposition en décembre dernier : celle sur le transport d'animaux. En dépit d'une vive déception liée au retard pris par les trois autres propositions, des millions de citoyens européens attendaient beaucoup de cette proposition législative relative au transport d'animaux vivants.
Cependant, leurs attentes sont loin d’avoir été satisfaites. Cette proposition améliore par certains aspects la protection des animaux d’élevage pendant leur transport, en définissant par exemple des seuils maximums de températures au-delà desquels il est interdit de transporter les animaux, en augmentant l’espace alloué aux animaux, et en limitant la durée du trajet pour les animaux destinés à l’abattage. Cependant, la révision présente des incohérences importantes voire diminue les exigences sur d’autres aspects. De plus, le transport d'animaux non sevrés et l'exportation d'animaux vivants vers des pays tiers de l’Union européenne (UE) n’ont pas été interdits, allant à l’encontre des demandes citoyennes.
Depuis 2007, le règlement (CE) n° 1/2005 du Conseil relatif à la protection des animaux pendant le transport est appliqué, mais il ne suffit pas à garantir le bien-être des animaux, comme cela a été montré à maintes reprises. Chaque année, plus de 1,35 milliard de volailles, 37 millions de porcs, 4,30 millions de bovins et 3,30 millions de moutons, chèvres et autres animaux sont entassés dans des véhicules et transportés pendant des jours, voire des semaines. Les tragédies et les accidents sont fréquents, tant sur les routes que par mer, et des milliers d'animaux ont trouvé la mort dans des conditions dramatiques.
Parmi les problématiques majeures de la législation actuelle, nous pouvons citer : le transport d'animaux trop jeunes, malades ou blessés, des véhicules chargés à de trop fortes densités et dépourvus de systèmes de ventilation adéquats, la durée excessive du transport sans période de repos suffisante ou encore, le transport d'animaux par températures extrêmes.
Ce qui a été proposé ?
Une amélioration concerne la réduction de la durée maximale du transport des animaux destinés à l’abattage.
En effet, alors que la durée maximale de transport sans période de repos pouvait aller jusqu’à 29 heures, elle a été réduite à 9 heures, avec des exceptions en l’absence d'abattoir adapté à une distance atteignable dans ce laps de temps. En revanche, les animaux transportés à d’autres fins que l’abattage (par exemple, pour la reproduction ou l’engraissement), pourront encore être transportés pendant 21 heures (avec 1 heure de repos sans déchargement après 10 heures de trajet) et, si nécessaire, ils seront transportés encore 21 heures supplémentaires, après avoir été déchargés pendant une période de repos de 24 heures à un poste de contrôle.
En outre, le texte exclut non seulement l'interdiction des exportations d'animaux vivants, mais il omet également toute mention de limites de durée pour le transport par voie maritime. C'est très préoccupant, car les transports par mer sont souvent longs et les conditions pour les animaux difficiles. Les exportations vers les pays tiers posent un problème particulier, car dans les faits, il est impossible de garantir le respect de la législation de l'UE hors de ses frontières. De nombreuses enquêtes d'ONG et de journalistes montrent que les règles de l'UE sont le plus souvent ignorées.
De manière incompréhensible, plusieurs éléments du texte proposent des normes moins strictes que les règles actuelles. Il s'agit notamment des éléments suivants :
- Réduction de l'espace alloué aux porcs lors des transports maritimes
- Suppression du contrôle de la température à l'intérieur des véhicules (en se basant uniquement sur des indicateurs de température externes)
- Autorisation des transports de nuit même lorsque les températures ambiantes sont supérieures à 30°C (mais avec une densité de chargement inférieure de 20 %)
- Suppression des niveaux minimaux de flux d'air
- Prolongation de la durée du voyage pour les lapins reproducteurs jusqu'à 24 heures au lieu de 12 heures (lorsque des aliments et de l'eau sont fournis dans le véhicule).
- Exemption des exigences pour les animaux transportés à des fins scientifiques.
- Chargement de moutons dans un navire pour l'exportation
Chargement de moutons dans un navire pour l'exportation
Qu'attendre des institutions européennes dans les mois à venir ?
En examinant le nouveau règlement, nos principales préoccupations pour l'avenir concernent l'absence d'interdiction des exportations vers les pays tiers, du transport d'animaux non sevrés et des transports maritimes. À cela, s'ajoutent les durées autorisées pour le transport des volailles et des lapins, qui dépassent les limites recommandées de 4 heures maximum. Pour les autres animaux, les durées de trajet dépassent également les recommandations scientifiques.
Le transport des femelles gravides pour lesquelles 80 % de la période de gestation s’est écoulée, constitue un écart important par rapport à la limite de 40 % recommandée, de même que les exemptions au règlement pour les animaux utilisés à des fins scientifiques.
Bien que la nouvelle proposition comporte certaines améliorations, il est clair qu'il reste encore un long chemin à parcourir avant de parvenir à adopter des normes qui amélioreraient de manière significative le bien-être des animaux pendant le transport.
Dans les mois à venir, il est impératif que le Parlement européen et le Conseil de l'UE modifient cette proposition en fonction des dernières données scientifiques et des demandes citoyennes, afin de mettre en place un règlement sur le transport qui protège réellement les animaux.